Les petits bonhommes ordinaires

Le moment s’y prêtait dans le tête à tête que je passais avec ma plus jeune de huit ans.

 

Je lui demande à brûle pourpoint sous le mode du film russe Anna 6 18 : « Es-tu une petite fille heureuse ? ». Son regard s’illumine et elle me répond « Oui, très ! ». Je pousse un peu plus loin « Qu’est-ce qui te rend heureuse ? »

 

Sans hésiter, comme émanant d’une évidence, elle me répond : « Ma famille ».

 

Je pousse le jeu un peu plus loin, car visiblement, le sujet lui plaisait. J’ajoute alors : « Qu’est-ce qui te rend heureuse avec ta famille ? Bien, parce que je l’aime, » répond-elle avec aplomb, où le doute ne peut loger.

 

Quand nous préparons des enfants à la première communion et qu’ils doivent parler de ce qui est le trésor le plus cher à leurs yeux, ils répondent tous « la famille ». Ils ne répondent pas cela pour être gentils, pour être mieux vus : ils le pensent réellement. On le voit dans leurs yeux.

 

Ce qui est étonnant d’une certaine façon est le fait que le plaisir des enfants n’est pas forcément de se sentir « aimer » – bien que cela doit être intrinsèque – mais  que leur bonheur réside dans le fait « d’aimer » !

 

Je repense au Petit prince où les adultes ne voient qu’un chapeau dans la scène du serpent qui a dévoré un éléphant… Je pense à Jésus qui disait que « cela a été révélé aux tout-petits ».  Les enfants ne s’y trompent pas. Ils voient réellement l’essentiel. Aimer, voilà cette petite lumière bienfaisante qui nous illumine tous !

 

Qui ne se souvient du printemps de leur jeunesse où le sentiment amoureux les remplissait de bien-être ?  En vieillissant, la stabilité de l’amour conjugal, l’approfondissement de cet amour stable et accueillant apporte tellement de paix !

 

L’amour, à toutes les étapes de notre vie demeure la valeur refuge essentielle à la vie. On ne peut vivre sans aimer, quelle que soit notre condition de vie. Notre curé partageait à la messe dernière combien il nous aimait tous réellement ! Et c’est ce moteur d’amour qui le met en marche, qui le pousse à œuvrer pour le bien de tous.

 

Quand on choisit la voie du mariage, il est important de toujours garder bien en vue le plus important. Nous pouvons être noyés par de multiples tâches, exigences, multiples responsabilités. Nous les faisons bien souvent par amour. Il faut veiller à ne pas laisser d’autres pôles dépasser cette priorité dans nos vies. Nous devons tous gagner notre vie mais l’âpreté au gain peut être une menace pour l’amour. Nous voulons tous nous épanouir et réaliser nos rêves, mais sacrifier les siens pour « monter » dans la hiérarchie finira par affecter l’équilibre conjugal et familial.

 

Le vrai bonheur réside dans de très petites choses. Il faut oublier le clinquant qui cache l’essentiel. Le secret de nos petits bonheurs durables se cache dans la trame de nos fils quotidiens d’amour, rechoisis « premiers »  à chaque jour dans notre liste de priorités.

 

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Caroline PINET écrit régulièrement sur le thème de la famille ; elle collabore au site internet « Spiritualité 2000 » des Dominicains du Canada.