Alors que le Sénat s’apprête à examiner à partir du 30 mars en première lecture le projet de loi séparatisme, les représentants des trois églises du christianisme viennent de publier une tribune inédite dans « le Figaro » dans laquelle ils s’inquiètent pour leur liberté.
Face à une inquiétude commune grandissante qu’est le projet de loi séparatisme, les représentants des trois églises du christianisme ont uni leurs voix. Dans une tribune publiée mardi 9 mars dans Le Figaro, le pasteur François Clavairoly, président de la Fédération protestante de France, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France (CEF) et le Métropolite Emmanuel Adamakis, du Patriarcat œcuménique en France, estiment que s’il est nécessaire de lutter contre les « séparatismes », il faut le faire en respectant la logique de la loi de séparation. Ils s’inquiètent notamment de l’ampleur de la modification de la loi de 1905 que prévoit ce projet de loi.
D’une loi qui énonce les conditions de la liberté et laisse cette liberté s’exercer, on fait une loi de contraintes et de contrôles multipliés.
« Responsables orthodoxe, protestant et catholique, nous affirmons notre attachement à l’ambition et à la promesse de la République », assurent ainsi les trois représentants. « A travers les heurs et les malheurs de l’histoire, cette ambition et cette promesse ont permis à notre pays d’unir des hommes et des femmes extraordinairement divers ». Avec le projet de loi séparatisme, « d’une loi qui énonce les conditions de la liberté et laisse cette liberté s’exercer, on fait une loi de contraintes et de contrôles multipliés », dénoncent-ils. Et de citer : « contrôle systématique par le préfet tous les cinq ans de la qualité cultuelle, contrôle redoublé des activités et des propos tenus au-delà de celui qui s’exerce dans les autres secteurs de la vie associative, […] redoublement de l’engagement républicain de quiconque voudra mener une activité avec l’aide de subventions publiques ».
Pour les trois représentants, par la logique interne du texte, quoi qu’il en soit des intentions, « ce projet de loi risque de porter atteinte aux libertés fondamentales que sont la liberté de culte, d’association, d’enseignement et même à la liberté d’opinion malmenée déjà par une police de la pensée qui s’installe de plus en plus dans l’espace commun », assurent-ils. « Tournant le dos à la séparation, l’État en vient à s’immiscer dans la qualification de ce qui est cultuel et dans son fonctionnement. Les pouvoirs publics disposent déjà des moyens de poursuivre, de dissoudre, de fermer ; ils n’ont pas besoin pour ce faire d’en revenir finalement à un contrôle de type concordataire ».